Marie-Christine Fournier-Gille, associée de Kramer Levin, intervenait pour le Fonds Commun de Titrisation « Hugo Créances II » dans un litige l’opposant à une société LEFRANC VINOLUX en liquidation judiciaire

Le créancier initial (CRCAM nord Est) avait consenti à la société un prêt notamment garanti par un gage sur stock de vins avec dépossession sous contrôle de l’organisme AUXIGA.

Dans le cadre de la vérification du passif, le juge commissaire avait refusé de retenir le caractère privilégié de la créance mais pour des motifs différents de ceux finalement retenus par la cour d’appel de Reims dans son arrêt du 18 septembre 2014.

Dans cette décision, la juridiction du second degré a relevé que le gage avait été conclu et mis en place selon les dispositions du droit commun des articles 2333 et suivants du code civil, alors que cette garantie « portait sur des matières premières et d’approvisionnement, éléments visés par l’article L.527-3 du code de commerce » et que cette convention était conclue entre « des parties dont l’une était un établissement de crédit » de sorte que le gage devait être impérativement soumis « au régime spécifique du gage des stocks prévu par les articles L.527-11 (lire L.527-1 à L.527-11) du code de commerce ».

La cour d’appel d’Amiens en avait dès lors conclu que le gage sur stock de vins devait être considéré comme nul et non avenu, et la créance du Fonds Commun de Titrisation « Hugo Créances II » admise en conséquence à titre exclusivement chirographaire.

Ce faisant, la cour d’appel de Reims s’inspirait du revirement de jurisprudence opéré en matière de gage sur stock par la cour de cassation depuis son arrêt du 19 février 2013 (position qui avait été confirmée dans la même affaire par résistance de la cour d’appel de Paris désignée cour de renvoi, par arrêt de l’assemblée plénière du 7 décembre 2015).

Le Fonds Commun de Titrisation « Hugo Créances II » a formé un pourvoi en cassation à l’encontre de l’arrêt de la cour d’appel de Reims en reprenant de nouveau ses arguments d’appelant, à savoir (i) que cette jurisprudence, décriée par la doctrine, reposait sur une lecture contra legem de l’article L.527-1 du code de commerce (ii) mais surtout s’avérait inapplicable à un gage sur stock avec dépossession.

La cour de cassation, dans son arrêt de cassation partielle du 31 mai 2016 a fait droit au pourvoi du Fonds Commun de Titrisation « Hugo Créances II » en des termes dépourvus de toute ambiguïté puisqu’il est ainsi jugé :

« Attendu que, pour admettre la créance de la banque au passif de la société à titre privilégié pour 50.000 € et à titre chirographaire pour le surplus, l’arrêt retient que, s’agissant d’un gage portant sur un stock de matières premières et d’approvisionnement, éléments visés à l’article L.527-3 du code de commerce, la convention des parties, dont l’une est un établissement de crédit, ne peut être soumise au droit commun des articles 2333 et suivants du code civil et L.521-1 et suivants du code de commerce, mais nécessairement au régime spécial du gage de stock prévu par les articles L.527-1 et suivants de ce même code et que, ne comportant pas les mentions cumulativement exigées par la loi, la lettre de la société invoquée par la banque ne peut valoir constitution de gage des stocks.

Qu’en statuant ainsi, alors que les dispositions des articles L.527-1 et suivants du code de commerce, dans leur rédaction applicable en la cause, s’appliquent seulement au gage des stocks sans dépossession et ne font pas obstacle à ce que, pour un gage des stocks avec dépossession, les parties, dont l’une est un établissement de crédit, soumettent leur contrat au droit commun du gage de meuble, la cour d’appel a violé les textes susvisés, le premier par refus d’application et le second par faute d’application ».